Septicémie : que sait-on de la hausse inquiétante de cas sévères chez l'enfant ?

Publié le 5 juin 2023 à 18h34

Source : Sujet TF1 Info

Une augmentation inhabituelle des cas de septicémie sévère a été observée chez des enfants en France.
Elle pourrait être associée à un nouveau variant d’un entérovirus chez des nourrissons.
L'OMS se veut toutefois rassurante sur les risques pour la population générale.

Les jeunes enfants sont-ils actuellement plus exposés au risque de septicémie ? La question se pose alors que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a récemment alerté sur une augmentation inhabituelle des cas de septicémie sévère chez les nouveau-nés. Une situation jugée préoccupante "en raison de la détérioration très rapide [des malades] et du taux de létalité associée chez les bébés touchés".

En avril dernier, la société française de microbiologie avait déjà alerté sur la hausse des cas chez les nourrissons, incitant à une "grande vigilance". 

De quoi parle-t-on ?

La septicémie est une réaction inflammatoire généralisée, causée par une dérégulation de la réponse immunitaire de l’organisme à une infection bactérienne grave. Si elle n’est pas prise en charge assez tôt, elle peut entraîner un dysfonctionnement d’organes vitaux potentiellement mortel. 

En France, 250.000 à 300.000 nouveaux cas de septicémie (ou sepsis) d'origine bactérienne sont détectés, selon l'Institut Pasteur, dont près de la moitié sont contractés à l'hôpital. On estime que 27% des cas environ conduisent au décès, mais ce pourcentage peut atteindre 50% des cas, notamment lors d'un choc septique. Environ 60.000 personnes décéderaient chaque année des suites d'une septicémie. Cette dernière causerait six millions de décès par an et environ trois millions de bébés.

Les septicémies comptent en effet parmi les causes de mortalité les plus fréquentes chez les enfants en bas âge puisqu'on estime qu'elles représentent 15 à 24 % des décès néonatals. 

Les nourrissons peuvent être infectés par des bactéries dangereuses aussi bien avant, que pendant ou après la naissance, notamment si une infection de la mère est transmise à l'enfant ou si l'environnement n'est pas stérile. 

Combien de cas ont été rapportés en France ?

A l'origine de l'alerte de l'OMS : près de dix cas rapportés entre juillet 2022 et avril 2023 dans quatre hôpitaux de trois régions de France. "Au total, neuf cas de septicémie néonatale avec insuffisance hépatique et des défaillances au niveau de plusieurs organes ont été signalés", détaille l’Organisation dans un communiqué publié le 31 mai 2023 dernier. Parmi les bébés touchés, sept sont décédés et deux étaient toujours hospitalisés en réanimation au 5 mai 2023. "Un tel taux de mortalité n’avait à ce jour jamais été observé dans le cadre de la surveillance des infections néonatales à entérovirus", indiquait de son côté la Société française de microbiologie (SFM) dans un communiqué publié le 27 avril 2023. 

Parmi les bébés touchés, huit étaient prématurés, à savoir nés avant 37 semaines d’aménorrhée. Il s’agissait de quatre paires de jumeaux nés entre 31+5 SA et 36+3 SA. Les symptômes sont apparus entre trois et six jours de vie. 

Quels sont les facteurs en cause ?

Pour sept cas sur neuf, une transmission materno-fœtale a été confirmée ou considérée comme probable, quatre des cinq mères ayant présenté des symptômes d’infection (fièvre, signes digestifs) dans les 48 heures précédant l’accouchement.

Pour la SFM, la contamination dans les sept premiers jours de vie, la prématurité et le petit poids de naissance mais aussi La gémellité et le sexe masculin (très prépondérants chez les 9 patients rapportés), pourraient expliquer la sévérité de l’infection. Mais la circulation d’un nouvel entérovirus, le variant d’echovirus 11, détecté à partir de juin 2022 en France métropolitaine et dans certains départements et régions d’outre-mer (Nouvelle-Calédonie et Réunion), pourrait être en cause. Les entérovirus sont un groupe de virus qui peuvent provoquer diverses maladies infectieuses et sont responsables d’épidémies annuelles affectant les nouveau-nés différemment et parfois plus gravement. 

Faut-il s'inquiéter ?

Eu égard au contexte, le SFM a formulé plusieurs recommandations aux médecins qui prennent en charge les nouveau-nés. Elle invite notamment à une surveillance rapprochée de la fonction hépatique, cardiaque, neurologique et du risque d’entérocolite chez les nouveau-nés présentant un tableau de sepsis néonatal sévère de cause indéterminée. Elle demande également aux médecins de prévenir précocement les CHU de référence chez tout enfant présentant des symptômes caractéristiques d’une infection à entérovirus, en raison d’un risque d’aggravation rapide et brutale.

L’OMS préconise de son côté aux établissements de santé prenant en charge des populations néonatales en France "de se familiariser avec les signes et symptômes et rester vigilants face aux éventuels cas et épidémies d’infections nosocomiales dans les services de soins néonatals". Dans son communiqué, elle tient cependant à rassurer la population en indiquant que "le risque pour la santé publique pour la population générale est faible, malgré la nature préoccupante de l’augmentation".

Pour rappel, dans un avis urgent rendu en décembre 2022, le directeur général de la santé Jérôme Salomon, avait demandé aux soignants de renforcer leur vigilance face à la recrudescence d’infections pédiatriques pouvant conduire à des septicémies. A l'époque, c'est la bactérie à streptocoque A qui était visée. Les cas rapportés avaient "entraîné l'hospitalisation en réanimation d'au moins 8 enfants sans facteurs de risque identifiés, parmi lesquels deux sont décédés", avait alerté ce dernier, précisant qu’un décès adulte avait aussi été rapporté.  La vigilance est de mise. 


Audrey LE GUELLEC

Tout
TF1 Info